Qu’est-ce que la conscience ? La question sonne comme l’intitulé d’un cours de philosophie. On pourrait la trouver abstraite, et la repousser par fatigue, par agacement.

Et pourtant, derrière le mot, il y a des comportements bien concrets. Engloutir un sandwich pour combler son estomac ou savourer une assiette assaisonnée : c’est affaire de conscience. Se poser pour manger, en appréciant des saveurs, des textures, la qualité des aliments. Avancer en fixant ses chaussures, des pensées plein la tête, ou marcher en regardant les arbres, les gens, les architectures : pareil, affaire de conscience. Habiter un corps qui se déplace, prendre en considération le décor traversé, oser croiser des visages, risquer le contact avec l’imprévu, peut-être s’offrir la surprise d’un sourire. Faire attention à soi, au lieu, aux autres. Faire confiance que de cette présence découle un apaisement, par le fait même de se sentir vivant.

On sait aujourd’hui, grâce aux travaux de la psychologie, grâce aux études sur le cerveau, que la présence demande un effort. Un effort pour sortir de nos automatismes, de ce crâne qui mouline tellement qu’il nous coupe du réel. C’est comme pour la pratique du sport : ça demande un effort mais c’est crucial pour rester en bonne santé et augmenter sa longévité. Pour quel objectif cultiver la conscience ? Pour se saisir pleinement de sa vie. Rien de moins. La conscience nous permet de faire de vrais choix, d’être pilote le plus souvent possible.

Je crois que la poésie est un chemin de conscience. En tout cas, c’est ce que j’apprends en la fréquentant. Elle m’emmène plus loin dans mon expérimentation de l’existence sur terre. Une couche plus profonde, plus riche, comme dissimulée et pourtant si facile à rejoindre.

Au passage, elle m’invite à être consistante. La poésie ne se limite pas à des mots dans des livres. Elle ne s’oublie pas une fois le bouquin refermé. Elle exige d’être reconnue à un coin de rue parce que soudain un reflet dans une fenêtre démultiplie la lumière. Parce qu’une feuille atterrit dans mes mains afin d’être contemplée. Parce qu’une fillette, dans un bus, m’interpelle pour me raconter sa peluche. Si on l’accueille, la poésie est partout.

Depuis que j’ai lancé le podcast « L’Expérience Poétique », j’ai le souci permanent d’être cohérente. Répondre à cette petite voix qui me prie d’incarner dans mon quotidien ce que je défends dans mon travail littéraire. Laisser plus de place à mon cœur poète, honorer mon âme sensible. Ralentir. Voir. Entendre. Ressentir. Élargir les horizons. Accepter d’être bouleversée. Goûter cette solitude qui n’en est jamais une. Mettre plus d’amour, plus de tendresse, dans mes relations. Murmurer des phrases caresses à la nuit tombée. Adopter un autre langage avec plus d’images, plus de musique, plus de lyrisme. La poésie aiguise mes émotions, mes perceptions, mes mots. Mine de rien, elle me transforme. Mine de rien, comme tout travail de conscience, elle me conduit à davantage de confiance, d’ancrage, de joie.

Et vous, elle vous fait quoi la poésie ?

Photo : © Marine Lécroart Photographies

> Ce texte fait partie de la série 2022 « de la confiance ». La confiance, en soi, en l’autre, en la vie, je suis convaincue que cela change une trajectoire… Vous aimez ce que je publie ? RDV sur les réseaux sociaux pour retrouver de la poésie, des idées lecture, et les autres chroniques que j’écris depuis 2016. Et si vous croyez en la nécessité de faire sa part de colibri, partagez ce texte.

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