Je n’ai pas été au cimetière cette semaine. Je n’ai pas pu quitter Marseille et accompagner ma mère qui, chaque année, fait le tour des tombes familiales, dispersées en région parisienne. Elle rend visite à ses propres parents, salue ses grands-parents, et va fleurir la stèle où la petite fille repose avec une autre branche de la lignée.

C’est toujours profondément émouvant ce périple annuel que ma mère prépare plusieurs jours avant, en réunissant quelques plantes, en mettant quelques chiffons et quelques outils de jardinage dans un sac, afin d’avoir le matériel nécessaire pour prendre soin des sépultures.

J’aime la rejoindre pour honorer celles et ceux qui sont venus avant nous, qui sont montés d’Auvergne, de Lorraine, de Charente, s’écrire une autre destinée à Paris, en changeant de métier, en mobilisant intelligence et courage, en affrontant les défis de la guerre, les efforts de la reconstruction, les obstacles personnels et professionnels que la vie ne manquait pas de placer sur leur route.

A chaque arrêt, nous prenons le temps d’évoquer des anecdotes, des traits de caractère, des souvenirs. Sourire en faisant un instant revivre la personne. Puis réciter une prière, des mots simples, lumineux, murmurés ou chantés, en ayant confiance que l’amour sait les trouver là où ils sont désormais.

Émouvant oui, et joyeux aussi. Parce que c’est merveilleux ce souffle qui court, fil inébranlable, d’un corps à un autre, comme une flamme olympique. Parce que les épreuves et victoires de nos ancêtres font les femmes que nous sommes aujourd’hui. Elle, la mère à l’énergie infatigable, qui s’investit dans mille projets où la transmission est le mot clé. Moi la fille qui poursuis avec ténacité cette envie de changer le monde, glisser de l’optimisme, de la beauté, du sacré dans notre époque déboussolée.

Je sais que nous tenons, elle comme moi, une partie de notre force des générations précédentes. Et je sais que nous partageons cette confiance, elle et moi, que les nouvelles générations trouveront des solutions aux challenges qui seront les leurs. Nous sommes les chaînons d’une histoire tellement plus grande que nous. Nous sommes les maillons précieux et pourtant minuscules d’une dynamique qui nous échappe. C’est bon de s’en rappeler, en contemplant l’avenir avec la foi d’un cœur qui abrite un ADN multimillénaire.

Et vous, avez-vous eu la possibilité de rendre hommage à vos aïeux ?

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> Pour la photo, j’ai puisé une image dans mes albums des années 1980 : je suis une gamine sage dans les bras aimés de mon grand-père Guy, parti il y a 25 ans, un jour d’été, vert et heureux.