M’Chroniques n°7 – MOINS ET MIEUX
- avril 23, 2020
- by
- Mathilde Vermer
En confinement, les jours se suivent et ne se ressemblent pas tout à fait. En plus de mon travail, en plus des nécessités du quotidien, je poursuis ma réflexion sur le monde d’après. Partout, des voix s’élèvent pour annoncer mille catastrophes – mais je n’ai pas envie de suivre cette tendance, de me laisser emporter par l’inquiétude. Sans être dans le déni sur la dégradation économique qui nous attend, je sais que cette crise, comme tout crise, est porteuse de potentiels. Elle peut devenir l’occasion d’une mue de civilisation, c’est-à-dire une transformation en profondeur. J’y crois, et j’ose la rêver, dans ma tête de citoyenne qui possède des droits et des devoirs. Je réfléchis à ce que j’ai envie pour la suite, à la fois pour nous en tant que société, et pour moi dans ma vie.
Il faut dire que cela rejoint une quête qui m’habite depuis longtemps : j’ai toujours eu des engagements forts, un souci du monde qui m’a conduite à travailler plusieurs années au sein d’ONG, en France et à l’étranger. A côté de ça, parce que j’ai vécu en Inde, parce que la philosophie indienne m’a profondément marquée, j’ai la conviction que le changement collectif part souvent d’un changement individuel. Il faut que les mentalités évoluent pour que des comportements évoluent. Ainsi, pour la société que je rêve, pour que cette société soit plus égalitaire, plus écologique, plus empathique, je tente moi-même, dans les situations de tous les jours, d’être un « meilleur être humain ». Pas dans le sens de la performance. Dans la façon d’être. Je cherche à être plus authentique, plus patiente, plus joyeuse, plus ouverte, plus claire, plus solidaire, plus créative, plus responsable… Honnêtement, dans cette recherche, il y a des jours où ça fonctionne mieux que d’autres, des jours de victoire, et des jours d’échec.
En ce moment, me travaille particulièrement mon rapport au temps. C’est une question qui m’interpelle depuis longtemps et qui revient en force. Je trouve que cette époque nous demande de travailler trop. Et moi, qui suis à mon compte, obligée d’être sur tous les fronts à la fois, je trouve que je travaille beaucoup trop pour mon activité d’écriture et d’accompagnement. En cette période de confinement, il m’arrive encore de bosser en soirée et le week-end, alors que je voudrais avoir des plages vides… Les journées passent trop vite et me laissent chaque soir épuisée. Je crois que cette charge de travail, que je subis comme beaucoup de mes contemporains, est l’héritage de siècles où les individus avaient obligation de travailler énormément pour faire face à leurs besoins. Aujourd’hui, alors que nous avons d’autres technologies, alors que nous sommes pour beaucoup sortis de la pauvreté (pour beaucoup, j’ai dit – ce qui sous-entend que j’ai conscience que la précarité est encore une réalité ici et ailleurs), nous continuons à nous agiter du matin au soir, à tourner dans une roue qui jamais ne s’arrête. C’est absurde : pendant ce temps-là, la vie s’échappe, les enfants grandissent, les saisons valsent, les plus vieux meurent, et nous gâchons tant d’heures où nous pourrions être ensemble, profiter pleinement les uns des autres, s’entraider, regarder la beauté, méditer, jardiner, lire, apprendre, cuisiner…
Ce temps qui fuit en permanence me tracasse. Ce tracas est à l’origine de la décision prise il y a quelques mois de quitter Paris, partir vivre à Marseille, pour expérimenter un autre rythme. Le confinement me pousse à aller plus loin dans ma réflexion. Je sens que ce n’est pas seulement un changement de lieu qu’il me faut. C’est un changement dans mon temps de travail. Travailler moins. Ce qui n’est possible que si je réduis de façon importante mes coûts, mes dépenses. Voilà ce qui est plus difficile : être très honnête avec moi-même et décider, en conscience, en alignement avec mes valeurs, de réduire ma consommation, de choisir avec grande vigilance comment j’utilise mes ressources, en achetant quoi et à qui. Je sais que c’est un chantier important et que je ne vais pas tout résoudre en deux minutes. Mais je sais que j’ai envie de le tenter : examiner mes besoins et réduire mes achats, mes sorties, ma conso alimentaire, électrique, internet… Je ne cherche pas à convaincre en parlant de cela : c’est un défi d’abord personnel. Faire du tri pour être davantage centrée, davantage aux commandes de ma vie, davantage heureuse.
Et vous, quel changement dans votre vie, vos habitudes, votre regard, vous aimeriez tenter pour que la société de demain ait un autre visage ? Laissez un commentaire bienveillant si vous avez envie de dire un mot sur votre cheminement actuel.
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