Chronique de l’Ailleurs n°33 – LA VITALITÉ DE BOMBAY
- septembre 15, 2017
- by
- Mathilde Vermer
La ville est tentaculaire, encombrée, pressée. Du petit matin au coucher, un flot ininterrompu de voitures, de bus, de camions : les artères qui la quadrillent débordent. A l’abri de la chaleur et du bruit, dans la fraîcheur d’un taxi, je regarde le paysage urbain qui defile.
Alternance de hautes tours et de cahutes en tôle ondulée. Bombay a changé, Bombay chaque jour change. La cité incarne cette Inde moderne, chaotique et pleine d’énergie, qui fourmille, qui pétille, impatiente de goûter à toutes les opportunités ouvertes par les nouvelles technologies et par cette économie bouillonnante. En même temps, Bombay continue à être un lieu où les inégalités sont brutales, où les plus vulnérables sont broyés par la difficulté du quotidien.
Une affiche arrête mon regard. Une pub pour un hôpital, qui propose des traitements contre l’infertilité. C’est la troisième que je vois en quelques kilomètres : différents établissements hospitaliers mais toujours la même photo d’un couple qui entoure un nourrisson. Et un slogan qui évoque le bonheur de former une famille. Je repense à ma conversation de la veille, avec mon amie Aparna, passionnée par son job, une conversation sur le désir d’enfant, sur le recul de l’âge des femmes pour le premier bébé, sur le succès actuel, en Inde, des techniques médicalisées d’accompagnement vers la maternité.
Il y a deux jours, j’étais dans un village à 100 km au sud. Je devais rencontrer plusieurs villageois, les interroger sur les problèmes d’eau, me renseigner auprès des jeunes femmes sur leurs nouvelles activités génératrices de revenus. Or, en arrivant, on nous fait rentrer dans une maison. La veille, un petit garçon est né. Les femmes de la famille ont noué des fleurs dans leur cheveux pour célébrer cette naissance. Il y a de la joie et de la fierté dans l’air.
Après cela, je n’avais d’yeux que pour les enfants. A l’école, j’ai épié les mimiques timides et les rires malicieux, jetant à peine un coup d’œil sur les cartes accrochées aux murs, les livres enfermés dans les armoires, les tableaux avec les mots en Anglais et en Hindi. Dans la rue, j’observais les plus petits, occupés à jouer, à manger, à tirer sur le sari de leur mère.
Mon vol est ce soir. Je rentre après deux mois intenses de périple indien. Je rentre avec ces dernières images en tête, qui symbolisent ce mouvement vers la vie que je sens très fort dans ce pays, cette vitalité ardente qui me fait un bien fou.
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