Chronique de Nos Vies n°10 – LE PEROU DANS SA VOIX
- mars 15, 2018
- by
- Mathilde Vermer
Dehors, il pleuvait encore. Une pluie de mars, fine, continue. Les gens arrivaient en marchant vite, pressés de se mettre à l’abri. Le bateau, où se tenait l’événement de l’association, les accueillait dans un bain de chaleur. Trouver un siège, s’installer, attendre. Très vite, premier choc, surgissement de l’émotion : sur un écran, apparaissent des visages qui parlent en espagnol. Des paysannes, qui habitent dans les montagnes andines du Pérou. Le documentaire raconte leur combat, une histoire de femmes qui se mobilisent pour protéger lacs et rivières, face aux compagnies minières qui accaparent et polluent l’eau. Des paysannes qui ont peu étudié à l’école, mais qui se dressent, avec courage, détermination, au péril de leur vie, pour protéger la terre, pour permettre la survie de ceux qui en vivent et en prennent soin.
L’écran finit par s’éteindre. Christine prend le relai, sa guitare en bandoulière. Deuxième choc de la soirée, émotion fulgurante qui me donne immédiatement le frisson. Avec des textes en français et des mélodies imprégnées de sonorités colorées, les couleurs de ce Pérou où sa mère est née, Christine chante. Dans ses chansons, la poésie se mélange à ses convictions humanistes, sociales, écologistes, féministes. Christine est reliée, dans son sang, dans son cœur, à ces femmes des montagnes, ces gardiennes de la Pacha Mama. Christine chante l’eau, l’Amazonie, cette planète qu’il nous appartient de préserver. Je laisse sa voix fondre en moi, venir me transpercer, m’emplir tour à tour de douceur, de puissance et de mélancolie.
Quand le silence a avalé les derniers sons, j’étais une autre. Conquise et bouleversée. Douloureuse de cette douleur péruvienne, de cette force de vie et de cette vulnérabilité humaine. Je me suis approchée de Christine, embarrassée, gauche. On dit quoi à une artiste qui vous a transpercé de ses vibrations ? C’est étrange comme l’admiration est difficile à résumer en quelques phrases… Alors, j’ai fait ce que je savais faire, j’ai posé des questions. On a bu un verre et Christine m’a raconté la jungle du Pérou, la sensualité des femmes dans sa région d’origine, la violence terrible de ce pays. Elle a partagé ses univers : son amour fou pour les recueils de Desnos ; les ateliers qu’elle anime auprès d’enfants et d’ados à la Philharmonie de Paris ; sa passion pour cette musique créole, rythmée, qui l’a tant marquée et inspirée ; le métissage qui est l’histoire de sa vie, de sa famille, de sa recherche musicale, le métissage qui est son point d’ancrage, sa valeur, sa ressource quand le blues de l’exil l’effleure, quand les galères de son quotidien de musicienne la font un instant douter.
Quand je suis ressortie dans la rue, sous la pluie qui tombait toujours, j’ai senti combien le voyage que je venais de vivre me donnait de l’énergie. Un voyage inattendu, si loin de cette péniche amarrée face à Notre-Dame. En regardant la cathédrale illuminée dans la nuit, j’ai salué, en moi, ces artistes qui savent faire passer tant d’émotions pour qu’on soit touché, qu’on s’ouvre, et qu’à notre tour, on se mobilise.
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Et vous, dernièrement, qui vous a touché avec sa voix ? Laissez un mot en commentaire.
Pour découvrir le talent de Christine Audat :
Visitez sa page FB
Réservez pour son concert le 27 mars prochain
Vidéo du travail qu’elle mène avec des enfants à la philharmonie
Enfin, vous pouvez l’écouter sur toutes les plateformes de téléchargement.